Apollinaire; Georges Bataille; John Le Carré; Sire de Chambley; Abbé du Laurens; Guillaume de Lorris; Pierre Michon; Jean-Marie Gourio; Jing P’ing Mei; Michel Onfray …

Apollinaire.
Je te les ferai tordre de douleur et de délices jusqu’à ce que pantelante je te prenne profondément, bouche à bouche, et si tu ne te rends pas c’est le supplice du pal que je te réserve…

Georges Bataille.
Je mets mon vit contre ta joue
le bout frôle ton oreille
lèche mes bourses lentement
ta langue est douce comme l’eau
ta langue est crue comme une bouchère
elle est rouge comme un gigot
sa pointe est un coucou criant
mon vit sanglote de salive
ton derrière est ma déesse
il s’ouvre comme ta bouche
je l’adore comme le ciel
je le vénère comme un feu
je bois dans ta déchirure
j’étale tes jambes nues
je les ouvre comme un livre
où je lis ce qui me tue.

Anonyme chinois.
Xu Xuan prit le lotus de la jeune fille, entrouvrit légèrement son corps de jade et se mit en elle. Ses yeux de phénix tournés vers le ciel, Rongniang poussait de petits cris mignons qui trahissaient une émotion extrême.

John Le Carré.
Et coup à coup, il l’embrassait, la prenait : il était son maître, il faisait des tours de passe-passe en elle et au-dessus d’elle.

Sire de Chambley.
Pendant que je me tords sur mon axe viril
Comme Saint Laurent sur son gril :
– O femme! Qui dira la foule involontaire
Des pucelles qu’on fait moisir?
Qui dira les doigts blancs dont l’effort solitaire
Gratte l’écorce du plaisir?
Clitoris sans amour des vierges par devoir,
Muqueuses en rut, coeurs en peine,
C’est pour vous que j’agite et que je fais pleuvoir
Ce qui vous manque et qui me gêne.
…Car j’ai votre idéal, si vous avez le mien!
Venez. Prenez : c’est votre bien…
… J’ai la liqueur et vous le vase…
Vous tendez votre coupe à mes deux échansons.
Moi généreux et vous avide :
Fête longue et vins chauds! A nos santés versons
Mon trop plein dans votre trop vide !
Rythme bien ton ardente caresse
Au gré de mon balancements,
O mon âme… Lentement,
Prolongeons l’instant d’ivresse.
Là… Vite! Plus longtemps !
Je fonds ! Attends,
Oui, je t’adore…
Va ! va ! va !
Encore.
Ha !

DR.
Abbé du Laurens, L’Arétin moderne, 1763.
Godemiché n’était pas comme les hommes obligés de passer par les misères de l’enfance. Dès qu’il fut dans le sein de la jeune abbesse, il s’électrisa et prit aussitôt l’âge de puberté. Le premier usage qu’il fit de son existence fut de glisser du corset de l’abbesse vers un endroit que la pudeur m’empêche de nommer dans un siècle où la décence est un si beau mot.
L’abbesse tomba dans l’instant en extase, ses yeux mourants et presque fermés par le plaisir : un mouvement délicieux l’agitait voluptueusement à chaque secousse que lui donnait Godemiché, elle s’écriait : Ah!… ah! j’expire… mon bon Jésus, est-il possible que ta bonté ait rendu tes créatures susceptibles de tels ravissements ?
À peine Godemiché eut-il rempli de son onction la mère abbesse, qu’il s’envola sous le jupon d’une jeune novice : la nonne tomba à l’instant dans cet état charmant qui rend les mortels égaux aux dieux. Ah ! coeur, s’écria-t-elle, ô plaisir… je meurs… j’expire… attends… finis… non, continue… Un silence enchanteur succéda à ce barbouillage; bref, Godemiché, comme un papillon volage, ou comme un Français, voltigea de nonnes en nonnes, les combla de plaisirs.
Fatigué de tant d’exploits, le héros tomba à terre. Une vieille discrète le ramassa, et croyant le ranimer dans son sein comme elle avait vu faire à son abbesse, elle ne fit que hâter le moment de son trépas; le valeureux Godemiché, épuisé de fatigue et saisi par le froid qui le prit subitement dans les tétons secs de la douairière, expira.
L’abbesse et les nonnes, revenues de leur extase où le plaisir les avait plongées, demandèrent où était le dieu qui les avait enchantées. La vieille le tira de son sein et leur montra le pauvre Godemiché sans vie : à ce spectacle, elles versèrent un torrent de larmes; l’amour, ce vrai consolateur du monde, leur donna l’idée de faire une figure semblable à celle du défunt.
On la fit d’abord de chamois, quelque temps après de velours, et les siècles perfectionnèrent tellement l’instrument qu’on introduisit dans son sein un petit réservoir de lait chaud qu’un piston artistiquement construit élance avec vigueur dans le séjour constant de plaisirs; depuis ce temps, l’image sert de réalité : la figure du mort a passé dans tous les couvents où il a pris le nom honnête de bréviaire du diocèse.

Guillaume de Lorris – Le Roman de la rose (début XIIIe siècle).
Car luxure règne partout
Ses pouvoirs ne cessent de croître
Ni en abbaye ni même en cloître
La chasteté n’est plus sûre.

Pierre Michon, la Grande Beune, 1996.
Hélène me servait son perpétuel jambon, ses pâtés de mousquetaire; mon désir n’avait pas décru, il me pesait au ventre pendant que je mangeais. Je battais la campagne, je passais les bornes.
J’imaginais, dans la salle de sang de boeuf aux odeurs de mégot, de futaille, de salpêtre, tous les buveurs partis vers la nuit noire à quoi nul ne résiste, la buraliste cédant aussi à cet appel, se dressant sur son lit, jetant son imper sur son dos pour accourir là en tordant les chevilles sur ses hauts talons, la reine, entrant comme le vent, à deux mains tremblantes ouvrant l’imper, et, à ma seule disposition sous l’oeil réfléchi d’Hélène derrière son comptoir, jetée nue sur les tables poissées, sur le flipper éteint, y secouant ses sequins, y perdant ses yeux blancs, dans toutes les postures enfin où se puisse le plus largement connaître son poil corbeau, ses cuisses orgeat, ses fesses de nacre, jouissant immodérément sous un renard, ses cris d’orfraie tombant, dévalant la falaise, étonnant les braconniers assoupis sur la Beune. Je l’étripais.

Jean-Marie Gourio (Brève de comptoir).
À la télé, à part le porno, je vois pas ce qui est regardable et qui soit pas débile pour adulte.

Jing P’ing Mei – « Fleur de prune dans le vase d’or » période Ming.
Première Fleur versa du vin pour Madame Ping et pour son invité Hsi-Mên et laissa le couple à leurs plaisirs coupables.
Se croyant seuls, les deux amants ôtèrent rapidement leurs vêtements en soupirant et se fouillèrent avec des doigts avides : lui les creux de ses aisselles et de son ventre à elle et ses fruits secrets, mûrs et succulents; elle la stèle de jade qui s’était érigée et le riche coffret du plaisir.
Mais que se passe-t-il ? Première Fleur, la coquine, avait percé un trou dans la paroi de papier de façon à pouvoir espionner les amants pris par leurs jeux. La jeune fille impudique est suffisamment proche pour sentir sur son visage le souffle des soupirs de sa maîtresse pendant que la langue de son amant ouvre le champs de cinabre parfumés. La servante était si près d’elle qu’elle pouvait même entendre le son de la flûte de jade qui glissait entre la langue et les lèvres de sa maîtresse.
Quelle est donc cette scène ? La luisante fontaine de jade était maintenant offerte à lui, et le tigre blanc traverse à grands bonds les champs de neige. La cadence augmente et les deux amants se réclament à voix haute, Madame Ping plus bruyamment par ses deux bouches, quand la prune pourpre bouge entre ses lèvres. Elle se tourne pour éperonner son cavalier, ses cheveux dansant sur son visage. Qui pourrait rester sec dans une telle tempête ?
Même la coupe de Première Fleur était maintenant pleine et ses doigts dansaient dans la brune humide. Ils sont désormais tous perdus. Hsi-Mên hurle au jaillissement de sa sèvre de feu, Madame Ping gémit les jambes secouées par le tonnerre et dehors dans le froid une petite créature est parcourue de frissons.

Michel Onfray.
Imaginons Héliogabale comme une hypothèse susceptible de montrer les traces de l’excès, ses formes et ses incarnations.
Né sur un berceau de sperme, mort dans les latrines étouffé dans les matières fécales, … Evoluant dans le stupre et l’infamie, directement demandeur de l’énergie qui embrase les volcans, le soleil.
Héliogabale est l’homme des décharges. Ses consumations sont toutes folies et confinent à la pure et simple pulsion de mort en acte. Chez lui, le sexe est oeuvre funèbre, le sperme liquide mortifère jamais loin du sang. Son arrivée à Rome est mise en scène, spectacle politique et jeu avec l’énergie. La procession qui l’accompagne est riche d’un immense char constitué, vraisemblablement, d’une carcasse de baleine dans laquelle trône un redoutable phallus de dix tonnes. Trois cent taureaux tractent l’engin et, pour plus d’ardeur, sont sollicités par une meute d’hyènes en furie à la tête du cortège. Turquie, Macédoine, Grèce, Balkans, Autriche : le phallus pénètre l’Europe avant de s’installer au centre de la capitale de l’Empire (…). Partout sur le trajet, ce ne sont que des danseuses nues, musiciens en nombre et danseurs châtrés qui ont offert leur membre à la divinité. Les sexes sont tannés, exhibés sur des piques d’or, accrochés sur des arceaux en métal noble. Profusion de pierres précieuses, de riches tissus et de parfums rares, bien sûr. Tout est unique, exceptionnel.(…). Tout au long du voyage l’Empereur fait montre de largesses : cadeaux dons, nourritures, argent, femmes. D’autres avaient fait dans l’encens, l’or et la myrrhe. Le défilé enchante, ravit, séduit. Il s’agit de montrer la capacité à l’abondance, la volonté de dépense et l’ouverture d’une ère de chance.
Et Rome se fait passive à l’arrivée du phallus monumental. Fi des rostres qui expriment la grandeur militaire de la ville ! Fi des temples qui montrent la piété de la cité ! Fi des bâtiments, des édifices, des constructions qui témoignent de la grandeur de la capitale ! Fi du Sénat, fierté politique des citoyens ! Il n’ y a vertu que du cirque et de l’amphithéâtre. Du pain et des jeux, du sexe et du sang, de la mort et de la débauche. L’Empire agonise. Héliogabale, le nouvel empereur, interroge les sénateurs sur leurs pratiques sexuelles : invertis ou pédérastes ? Sodomites ou zoophiles ? Puis il les remplace par des femmes, gynophile militant. Dans les lieux de culte, il insulte aux divinités, met à mal l’ensemble des pratiques liturgiques pour promouvoir le seul Hélios (…). Pour montrer l’exemple, il se prostitue. Puis il élève l’un de ses danseurs au grade de chef de la garde prétorienne. Quand il fabrique son gouvernement, il fait de la grosseur du membre de ses ministres le critère sélectif.(…). Enfin , il nomme des préfets, dans les villes de l’Empire, qui ont spécialement pour mission de corrompre la jeunesse.(…)
Le sexe et le sang connaissent une période d’épousailles effrénées. Bataille a dit combien l’érotisme était approbation de la vie jusque dans la mort; Héliogabale en active le principe. D’abord il déflore une gardienne du feu en public alors qu’on destine à l’enterrement vif celles qui étaient suspectées de stupre, car on exigeait d’elles une virginité avérée, ensuite il vend son propre corps et prend ceux qui passent à sa portée, sans aucun autre souci que sa propre jouissance; enfin il force des hommes à sacrifier au culte solaire en les contraignant à la castration. Du haut des murailles des bâtiments publics, il fait jeter des sacs entiers de membres sectionnés. Les dépenses (terme à ne pas prendre uniquement dans son sens économique, mais plus généralement la dépense dans tous les actes possibles dans l’existence) qu’il ordonne sont sauvages, elles ignorent toute mesure : Héliogabale, comme Sade en son temps, montre l’impossibilité d’un excès sans aucune limite. (…)
On pourra également signaler, qu’à cette époque à l’occasion de banquets plantureux, on servait des « tétines et vulves de truie farcies » entre autres mets aussi rares que variés. »